Sommaire Contexte

LE MOYEN ÂGE. XIe-Xiie siècles

 

Des comtes de Gascogne aux souverains Plantagenêts

La réorganisation des diocèses gascons au xie siècle

La création et le développement des monastères aux xie-xiie siècles

Sur la route de Saint-Jacques, les fondations des Ordres militaires et hospitaliers

 

 

Des comtes de Gascogne aux souverains Plantagenêts

La famille des Sanche qui régnait, depuis le début du xe siècle au moins, sur la partie occidentale de la Gascogne atteint l’apogée de son pouvoir aux temps de Guillaume Sanche et de ses deux fils.

Guillaume Sanche (vers 950-996), dont le mariage avec Urraca, sœur du roi de Navarre Sanche le Grand, avait resserré les liens avec les pays du versant sud des Pyrénées, vit vers 970-980 ses états s’agrandir également vers le nord, de l’Agenais et surtout du comté de Bordeaux légué par son titulaire, Guillaume le Bon. Bien que l’absence ou le caractère particulier des documents conservés ne permette guère de mesurer la portée de son action ailleurs que dans le domaine religieux, il est manifeste que son règne a été décisif pour la réorganisation et le renouveau de la Gascogne. On peut du reste penser que c’est par cette volonté que s’explique en partie le nombre d’abbayes - une dizaine - fondées par lui et par Urraca : on sait en effet que les foyers d’intense vie spirituelle que sont les monastères ont toujours été, et en particulier à cette époque, des centres très actifs de vie économique et de vie culturelle, et qu’ils ont donc certainement apporté une aide considérable au comte dans la réalisation de ses desseins.

Bernard Guillaume, qui succéda à Guillaume Sanche vers 996, semble s’être surtout attaché à confirmer l’action de son père, en particulier en faveur des monastères. Il devait décéder sans enfant à la Noël 1010, dans des circonstances assez suspectes. Son frère Sanche Guillaume qui lui succéda avait été formé à la cour de son oncle le roi de Navarre, et, comme ce dernier l’avait réalisé pour l’ensemble de l’Espagne chrétienne, il résolut de refaire l’unité au moins morale de toute la Gascogne, en associant comtes et vicomtes de la partie orientale à des œuvres communes. Mais cette volonté venait bien trop tard : en effet, dès le siècle précédent, dans cette partie orientale, de nouveaux comtés - ceux d’Armagnac, d’Aure, de Pardiac - s’étaient détachés des comtés anciens - ceux d’Astarac et de Fezensac ; la partie occidentale avait elle aussi connu une important phase de morcellement par la création de nombreuses vicomtés à l’intérieur des comtés : vicomtés de Montaner et de Lavedan dans le comté de Bigorre ; vicomtés de Béarn, d’Oloron, de Marsan, de Dax, de Tartas, de Maremne dans le comté de Gascogne...

Durant le règne de Sanche, l’importance des Landes dans cet ensemble, déjà sensible sous Guillaume Sanche, s’est encore accrue, et Saint-Sever a affirmé son rôle de véritable capitale : c’est là que le duc tient plusieurs assemblées de ses vassaux, et c’est dans le palais élevé sur le promontoire de Morlanne qu’il fait rédiger et marque de son seing son testament.

 

              Beatus de Saint-Sever. Dans la Vasconia, à côté de l'ecclesia sti severi, château du Palestrion

 

Avec la disparition de Sanche, lui aussi mort sans descendance en 1032, devait s’ouvrir une période de grande confusion dans l’histoire de la Gascogne. Plusieurs branches collatérales pouvaient en effet revendiquer la succession du comté, qui revint tout d’abord à un neveu du défunt, Bérenger d’Angoulême, puis, après la mort toujours sans descendance de ce dernier, en 1036, à un autre neveu, Eudes, qui disparut à son tour en 1040. Profitant de la confusion qui s’ensuivit, la belle-mère d’Eudes parvint à faire attribuer le pouvoir à son second fils Guy-Geoffroy, qui semble toutefois s’être davantage intéressé à la partie septentrionale - l’ancien comté de Bordeaux - qu’à la Gascogne proprement dite.

Cette négligence permit à un autre neveu, Bernard Tumapaler, comte d’Armagnac, de mettre la main sur le comté, dont il parvint pendant plus de vingt années à garder au moins la partie orientale qui correspondait approximativement au diocèse d’Aire. Bien que le besoin d’argent l’ait dans l’intervalle contraint à céder ses droits à Guy-Geoffroy pour 15 000 sous, il revint bientôt sur son engagement, et il ne perdit définitivement la partie qu’en 1063 ou 1064, après avoir été défait près de Saint-Jean-de-la-Castelle, non loin d’Aire, par son adversaire, déjà comte de Bordeaux, mais qui était devenu entre temps duc d’Aquitaine. Dès lors, l’ensemble de l’ancienne Gascogne se trouva de nouveau unifiée et placée avec l’Aquitaine sous un pouvoir unique, avec Bordeaux pour capitale.

Ainsi, en quelque trente années, la Gascogne, jusque-là étroitement liée au versant sud des Pyrénées par ses relations familiales avec la Navarre et parfois par une sorte de protectorat, avait été fermement amarrée au déjà vaste domaine de ses puissants voisins du nord.

On ne possède guère de renseignements sur l’action, sans doute très discrète, des successeurs de Gui-Geoffroy, Guillaume IX le troubadour et Guillaume X, en Gascogne. À la mort du second, en 1137, son duché revint à sa fille Aliénor, qui épousa le futur roi de France Louis VII.

Les nouveaux souverains ne semblent pas s’être beaucoup préoccupés de la Gascogne, pourtant troublée par les entreprises du vicomte de Béarn Pierre de Gabarret pour s’emparer de la vicomté de Dax. Le couple n’ayant pu avoir d’héritier mâle, le roi décida en 1152 de se séparer de son épouse, qui se remaria quelques semaines plus tard à Henri, comte d’Anjou.

Ces événements, qui accentuaient l’orientation de la Gascogne vers le nord, allait avoir sur elle des conséquences bien plus radicales, puisqu’en 1154, Henri devint roi d’Angleterre.

 

                 Duché de Gascogne au début du xie siècle                                                  Duché d'Aquitaine au milieu du xiie siècle

 

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